Spéléo Magazine 84
J’assistais dernièrement à une rencontre citoyenne de la montagne (de la spéléologie !) dont le thème était « n’est-ce pas le propre de l’Humain d’aimer flirter avec le risque ? ». Notre société est tentée par le principe du « risque zéro » et de son corollaire le « principe de précaution ». Si, au premier abord, l’absence de prise de risque semble séduisante, la réflexion aide à douter de cette réalité. L’Homme aime le risque ! Mais alors pourquoi l’être humain aime-t-il tant le risque ? Une vie sans risque est une vie fade. Vivre dans un monde sans risque reviendrait à vivre dans un monde sans plaisir, sans succès, faire de sa vie une histoire sans dimension…
Le risque est généralement synonyme de dépassement de soi. Et le fait de prendre conscience que l’on progresse, que l’on est utile, est aussi protecteur du stress. Il semble donc important de légitimer une certaine prise de risque. Il ne s’agit pas de prendre n’importe quel risque, bien entendu, mais de ne pas se priver de cette épice de la vie. Celui qui va partir en spéléologie avec les pires conditions météorologiques imagine avant tout qu’il reviendra vainqueur. N’est-ce pas ?
L’être humain aime d’autant plus le risque qu’il est optimiste. L’optimisme aide à transformer les soucis en défis ; il aide à prendre certains risques. L’être humain tirera aussi du plaisir à réussir là où le risque est important. C’est peut-être ce qui va le pousser à récidiver dans la prise de risque ? Le spéléologue (l’alpiniste) qui a réussi un exploit va vouloir certainement recommencer. La prise de risque est nécessaire pour vivre. Elle responsabilise. C’est le droit de vivre. C’est un élément formateur de la personne, une expérience sensorielle et physique, une affirmation narcissique, une forme de sécurité personnelle. Par conséquent, n’y a-t-il pas un vrai danger de chercher à nier la prise de risque ? N’est-ce pas un reflet contradictoire de notre société ? N’est-ce pas plus sain de chercher à canaliser la prise de risque ? En sachant toutefois que celle-ci est fondamentalement différente du danger…
Bonnes explorations 2014
Serge Caillault